Devant un public séduit, Etienne Minoungou a présenté « Traces. Discours aux nations africaines » un texte de Felwine Sarr. Sur la scène du théâtre verdure de l’Institut français de Dakar, l’acteur a agrémenté le monologue d’une musique sous divers instruments, ce jeudi 27 mai à l’institut français de Dakar.
Sur les traces de la musique
Soudain une douce musique s’échappe de la scène. Annonciatrice du début du spectacle, elle porte l’empreinte de Simon Winse, musicien multi-instrumentiste, originaire du nord du Burkina Faso. Un son qui sonne comme un rappel à l’ordre en mettant le holà sur les chuchotements entre différents groupes pour laisser place au bruit des arbres, au ronronnement des voitures et aux cris des enfants des maisons environnantes. Faisant fi de ce monde qui l’entoure, le musicien semble être dans sa bulle. Bien calé sur sa chaise, chemise en wax multicolore, jean et basket, Simon Winse de petits dreadlocks au vent, joue de son ngoni (Ndlr : instrument à cordes, considéré comme la guitare traditionnelle malienne) différentes mélodies harmonieuses. Instant choisi, à 20h 51 exactement, par Etienne pour faire son entrée. Bien installé devant le pupitre, il dit : «Elle me fut longtemps refusée. Et depuis qu’elle gît à mes pieds, près à s’évanouir et à se dissiper à nouveau, je ne la convoquai qu’avec circonspection. Je dois vous parler ». D’une voix sérieuse, parfois amusée, agrémentée d’un sourire ou même d’une voix grave, Etienne livre ces paroles de Felwine Sarr.
Quand la musique résonne sous le vent
Éclats de rires, applaudissements, le public conquis réagit ainsi aux différents thèmes évoqué par le spectacle : Situations politiques en Afrique, la jeunesse, le pillage des ressources, une Afrique réduite à un espace sous développé, l’immigration, l’histoire, les langues, les ethnies… Rien ne semble détourner le public de son spectacle. Ni le vent frisquet qui continue de souffler, ni les déplacements des personnes, encore moins l’arrivée des retardataires se frayant un passage à la recherche d’une place assise.
Séduit
Roger fait partie de ces spectateurs séduits. Cet originaire du Congo Brazzaville, avoue : « Je n’étais pas trop théâtre jusqu’ici et je n’avais jamais vu ce style de présentation.» Mais à la fin, debout à l’entrée du théâtre de verdure, il montre toute sa satisfaction en citant le passage qui l’a le plus marqué : « Leur orient n’est pas qu’ailleurs mais c’est aussi ici ». Tout comme Roger, Lucrèce, béninoise d’origine est venue prendre un verre avec ses amis en a profité pour assister à cette pièce, petite robe bleu debout à côté du restaurant, elle semble joyeuse en évoquant cette musique qu’elle considère comme « la belle surprise de la pièce ». Pourtant tout est parti du N'goni (guitare traditionnelle entre la kora et la guitare), de la flûte peul, et du lolo (arc à bouche) mais également cette voix de Winse très captivante. Le choix de cette musique s’impose et s’adapte au cadre. Celui africain explique Etienne.
Appel plaisant
« La pièce était intéressante, le narrateur excellent et j’ai été très séduite par le musicien. J’ai fait des recherches sur lui et j’ai déjà dressé ma Playlist sur deezer » lance-t-elle d’un léger sourire amusé. La musique explique Gnima Sarr, artistique compositeur, venue exprès pour la pièce a porté le texte. La vingtaine, elle ne passe pas inaperçu dans son style original, léger grand boubou blanc, talons hauts de tresses longues chapoté d’un bonnet africain customisé de petit miroirs, elle dit « Le texte dans globalité apporte sensibilité, du profond, de la dignité et de l’espoir sous un registre très humoristique ». Samantha Trécis originaire du Congo Brazzaville est du même avis « la musique est excellente et très plaisante » mais ce l'à qui séduit c’est la poésie autour du texte. Elle considère que ce genre d’appel à l’endroit de la jeunesse africaine est très plaisant.
Sous un regard inquisiteur
Assis devant durant tout le spectacle, Felwine simplement habillé chemise, chemise jean et chaussures fermé a regardé Etienne usé de sa voix, du geste aussi de légers déplacements dire ces paroles qui sont finalement de lui. « C’est toujours émouvant de voir quelqu’un d’autre incarner des mots que vous avez écrit. De les entendre raisonner différemment dans un autre corps et d’être en mesure d’avoir une distance par rapport à votre écriture » déclare-t-il. Dans ces paroles on envisage le jour autrement, sortir de l’ontologie de la souffrance, se reconstruire, s’édifier un avenir nouveau. Felwine affirme que le continent africain a les moyens de sa propre liberté.
Pour Etienne Minoungou C’est important que cette parole soit entendue de part et d’autres même si le public est principalement européen, l’essentiel c'est de raconter notre histoire, ses blessures partagées, et nos frustrations à tout le monde » souligne-t-il. « Certes le texte d’adresse plus à un auditorat africain, l’idéal au Sénégal c’est d’avoir un public plus concerné » note-t-il tout en exprimant son souhait et envie de s’adresser aux étudiants de l’université cheikh Anta Diop par exemple comme je l’ai fait il y a quelques temps à l’université de Burundi à Bujumbura face à 2000 étudiants, ma foi c’était chaud ! parce que c’est vraiment leur problème » lance-t-il. Du même avis Felwine Sarr confie que ce texte sera traduit en wolof afin d’être conté et compris par tout sénégalais.
L'orient
« Son orient c’est ici sur le continent, il s’y trouve sa dignité et sa pleine humanité. C’est à elle de la restaurer, de la cultiver. En le faisant, elle sèmera la conscience neuve pour tous les enfants de Hunan et de Toumai » faisant référence à la jeunesse avec cette parole le spectacle se renferme après 1h sous chaleureux applaudissement après un jeu de lumière qui la laisse éclaboussé à gauche à droite et au milieu. Ainsi il laisse place à un public charmé et une discussion avec l’auteur et l’acteur des « ces Paroles ».
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